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Une p¨¦tition a ¨¦t¨¦ lanc¨¦e pour sauver Curtis Windom. Une p¨¦tition a ¨¦t¨¦ lanc¨¦e pour sauver Curtis Windom. 

?Ne tuez pas en mon nom?: l'appel d'une victime pour sauver son p¨¨re condamn¨¦ ¨¤ mort

? quelques jours de l'ex¨¦cution pr¨¦vue du condamn¨¦ ¨¤ mort Curtis Windom, le diacre George Kain met en lumi¨¨re les injustices du syst¨¨me judiciaire am¨¦ricain qui ont conduit ¨¤ sa condamnation, ainsi que la pratique inhumaine de la peine capitale.

Francesca Merlo ¨C Cité du Vatican

La peine de mort est justifiée comme rendant justice aux victimes. Ses défenseurs affirment qu'elle permet aux victimes de tourner la page. Mais bien souvent, les personnes mêmes que la peine capitale est censée servir, disent le contraire. Les familles des victimes sortent des chambres d'exécution sans se sentir apaisées, mais plutôt vides. «On m'a dit que cela me ferait du bien. Pourquoi, au contraire, me sens-je tellement plus mal?», s¡¯interrogent-elles. Selon le diacre George Kain, il semble que les États qui procèdent à des exécutions utilisent les victimes comme boucs émissaires, pour justifier un meurtre sanglant et légalisé ¨C un meurtre qui, comme tous les autres, ne fait de bien à personne.

Le 28 août prochain, la Floride prévoit exécuter Curtis Windom, un homme noir qui a passé 33 ans dans le couloir de la mort. Il a grandi dans la pauvreté, souffre d'un handicap intellectuel et présente depuis longtemps des signes de lésions cérébrales. Sa défense juridique a été marquée par de nombreux échecs. La Cour suprême de Floride elle-même a reconnu que son avocat avait choisi de ne pas présenter de preuves de sa maladie mentale ou de ses lésions cérébrales, de peur que cela ne complique l'affaire. En conséquence, les jurés n'ont jamais entendu les preuves atténuantes cruciales. Et le jury qui l'a condamné à mort, l'a fait à une majorité de 8 contre 4, un verdict qui ne serait pas valable dans la plupart des autres États, ni aux yeux de la Cour suprême des États-Unis, qui a déclaré que les condamnations à mort devaient être unanimes.

Les victimes s'expriment

Ce qui rend le cas de Windom particulièrement frappant, c'est que les victimes pour lesquelles l'État prétend agir demandent la clémence. La fille de Windom, dont la mère a été tuée lors du crime, était encore un bébé à l'époque. Aujourd'hui adulte, elle a noué une relation avec son père et souhaite qu'il soit épargné. «Si nous disons que nous faisons cela pour les victimes, réfléchit Kain, et que les victimes disent maintenant qu'elles ne veulent pas que cela se fasse, alors que faisons-nous réellement? Disons-nous vraiment que c'est pour les victimes, ou ne faisons-nous que satisfaire notre désir sanguinaire de vengeance et de revanche?».

Loin d'apporter la paix, les exécutions traumatisent souvent à nouveau les familles. Kain se souvient de ses années en tant qu'agent de probation et chercheur: «Dès le premier jour, on promet aux victimes qu'elles trouveront la paix, qu'elles se sentiront mieux une fois que le meurtrier aura été exécuté. Mais j'ai rencontré des membres de familles qui ont assisté à des exécutions et qui sont ressortis en disant: "Je ne me sens pas mieux. Je me sens pire. Ne tuez pas pour moi, car tout cela ne fait que prolonger mon agonie".» Dans le cas de Windom, ce nouveau traumatisme se produit en temps réel. Sa fille, aujourd'hui adulte, plaide pour sa vie, mais l'État insiste pour l'exécuter en son nom. «Le système prétend agir pour les victimes, dit Kain, mais en réalité, il les ignore lorsqu'elles demandent grâce.»

Curtis Windom avec sa fille, Curtisia.
Curtis Windom avec sa fille, Curtisia.

Une contradiction

La Floride a procédé à plus d'exécutions cette année que tout autre État. Son gouverneur, Ron DeSantis, se définit comme un catholique pro-vie. «Il fut un temps où l'Église tolérait la peine capitale», explique le diacre Kain, «non pas comme une vengeance, mais comme une protection de la société contre un agresseur dangereux. Mais cette époque est révolue. Aujourd'hui, nous pouvons enfermer les gens à vie en prison. Nous n'avons plus besoin d'exécutions. Nos trois derniers Papes l'ont clairement dit. Le Pape François a même modifié le catéchisme pour déclarer la peine de mort inadmissible.» Pour le diacre, la position de l¡¯Église catholique repose sur un principe: la dignité. «Nous sommes tous plus que la pire chose que nous ayons jamais faite. Chaque personne a une dignité donnée par Dieu qui ne peut lui être enlevée.» Pour lui, la persistance de la peine de mort parallèlement à une éthique pro-vie représente une contradiction impossible à concilier.

Un système défaillant

L'histoire de Windom est l'une des nombreuses histoires marquées par des échecs: défense inadéquate, préjugés raciaux et verdicts non unanimes. La nouvelle loi de Floride qui abaisse le seuil de la peine de mort d'un verdict unanime du jury à une majorité de 8 contre 4 est, selon le diacre Kain, «un signal d'alarme pour la justice elle-même». Ses appels ont soulevé d'autres faits troublants: un témoin clé de l'accusation faisait l'objet d'une accusation criminelle en instance, dont le jury n'avait jamais eu connaissance; la Floride n'exigeait pas à l'époque que les avocats chargés de la défense dans les affaires passibles de la peine capitale répondent aux normes actuellement en vigueur; les familles des victimes elles-mêmes avaient demandé la clémence lors d'une audience de grâce en 2013. Chacun de ces arguments a été rejeté par les tribunaux comme étant «inopportun» ou «irrecevable sur le plan procédural». Au final, les juges ont déclaré qu'ils étaient «confiants dans le résultat» et ont refusé d'examiner même une demande de réexamen.

L'injustice est aggravée par la précipitation. Les avocats de Windom n'ont eu que cinq jours après la signature de son arrêt de mort par le gouverneur pour déposer des requêtes, malgré les restrictions sur les visites à la prison et les difficultés à obtenir des témoignages d'experts. Les tribunaux ont insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'une violation de la procédure régulière. Pour le diacre Kain, cette précipitation est délibérée, visant à empêcher la société de prendre le temps de réfléchir et de voir les failles du système. Elle place également les États-Unis en contraste flagrant avec les autres démocraties occidentales, qui ont presque toutes aboli la peine de mort. «Cela sape la crédibilité des États-Unis lorsqu'ils parlent des droits de l'homme à l'étranger», dit-il.

Un parcours personnel

Le diacre Kain lui-même était autrefois fermement favorable à la peine capitale. «J'étais un catholique qui croyait en la peine de mort», se souvient-il. «Je pensais protéger les victimes. Mais ce qui m'a vraiment bouleversé, c'est d'avoir écouté les familles des victimes. La grande majorité m'a dit que la peine de mort ne faisait qu'aggraver leur douleur. C'est là que j'ai réalisé que je ne les aidais pas, mais que j'aggravais leur souffrance.» Ce témoignage, associé à sa foi, l'a transformé.

Une vie de témoignage

Depuis sa conversion, le diacre Kain a fait de l'abolition de la peine de mort une partie intégrante de sa vocation. Avant son ordination, il a témoigné devant les assemblées législatives des États, a travaillé avec la Communauté de Sant'Egidio à Rome et a pris la parole lors de conférences en Italie, au Japon, aux Philippines et en Norvège. Chaque année, il se rend à Rome pour la réunion «Villes pour la vie» organisée par la Communauté le 30 novembre contre la peine de mort.

Aujourd'hui diacre dans le diocèse de Bridgeport, il poursuit cette mission dans son ministère. Il prêche sur des cas comme celui de Windom, en les reliant à l'appel de l'Évangile à la miséricorde et à la réconciliation. «Je ne suis pas surpris, dit-il, de me retrouver en Floride en ce moment, appelé à nouveau à m'opposer à une exécution. Ce n'est pas un hasard. C'est une bénédiction ¨C et une responsabilité.»

George Kain (au centre) en compagnie du frère Dale Recinella (à gauche), aumônier du couloir de la mort en Floride, et Carlo Santoro (à droite), de la Communauté de Sant'Egidio.
George Kain (au centre) en compagnie du frère Dale Recinella (à gauche), aumônier du couloir de la mort en Floride, et Carlo Santoro (à droite), de la Communauté de Sant'Egidio.

Justice, miséricorde et vie

Pour le diacre Kain, l'affaire Curtis Windom ne concerne pas seulement un homme, mais la signification même de la justice. «Ce n'est pas la justice que le criminel a tuée, dit-il, et ce n'est pas la justice que le criminel est tué. Dans la grande économie de Dieu, nous avons tous une obligation les uns envers les autres: prier pour les victimes, certes, mais aussi prier pour ceux qui tuent. La justice n'est pas la vengeance. La justice est enracinée dans la miséricorde.»

La fille de Windom plaide pour la vie de son père. Elle veut continuer à entretenir une relation avec lui. Pourtant, l'État de Floride est «déterminé à mettre fin à cette vie, non pas au nom de la justice, mais malgré elle», estime t-il. «Si nous écoutons vraiment les victimes, si nous respectons vraiment la dignité humaine, conclut le diacre Kain, nous verrons que les exécutions ne servent pas la vie. Elles la diminuent.»

Rejoignez les milliers de personnes qui demandent l'arrêt de l'exécution de Curtis Windom.

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25 ao?t 2025, 12:40