杏MAP导航

Entretiens réalisés par Marie Duhamel – Cité du Vatican

«Parce que nous avons une responsabilité vis-à-vis de notre communauté qui souffre», les patriarches et chefs des Églises de Jérusalem se sont rendus ce lundi 14 juillet dans le village de Taybeh, à l’est de Ramallah, qui subit des attaques toujours plus menaçantes de la part de colons israéliens. Ils étaient accompagnés de nombreux consuls et diplomates, de France, Belgique ou Italie notamment.

Accueillie par le maire du village Suleiman Khourieh et par le père Bashar Fawadleh, curé de la paroisse latine du Christ-Rédempteur, la délégation a assisté à la projection d’un film relatant les faits de violences récemment subis par les habitants de Taybeh.

Appropriation et incendies volontaires

Ces dernières semaines, sur la colline asséchée où poussent leurs oliviers, des troupeaux de vaches sont intentionnellement amenés par des colons, empêchant de facto les propriétaires de se rendre sur leurs terres et de les cultiver et menaçant ainsi l’économie du village qui repose en partie sur sa production d’huile d’olive.

Nouvel incendie criminel vendredi 11 juillet sur le terrain d'un villageois.

À cette réalité quotidienne est venue se greffer un autre type d’agression. Vendredi 11 juillet, des colons ont incendié des terres appartenant à des habitants, tout près de leurs fenêtres. Le feu s’est également déclaré derrière l'église historique Al-Khader, a rapporté à Radio Vatican le curé de la paroisse latine du Christ-Rédempteur à Taybeh depuis quatre ans.

Ces faits reproduisaient l’incendie intentionnel allumé par les colons lundi 7 juillet, à proximité du cimetière de ce plus ancien village chrétien de Cisjordanie.

La catastrophe aurait pu là aussi détruire entièrement l’un des plus anciens édifices religieux de Palestine, les ruines de l’église byzantine Saint-Georges al Khader du Vème siècle, là même où saint Charles de Foucauld se retira pendant le Carême 1898. Cet incendie du 7 juillet a été condamné par les prêtres des trois Églises chrétiennes locales, dans une déclaration exprimant l’inquiétude ressentie par leurs fidèles. Ils y lançaient également un appel aux chefs d’Église et aux diplomates représentant en Terre Sainte la communauté internationale.

Ceux-ci se sont, au moins en partie, mobilisés ce lundi, en se rassemblant symboliquement sur le site de l’église Saint-Georges à Taybeh, en Cisjordanie occupée à 50km de Jérusalem.

Faire pression sur Israël

Le patriarche de l’Église grecque-orthodoxe de Jérusalem, Théophile III, a été le premier à prendre la parole pour témoigner de son soutien aux habitants de Taybeh, soulignant auprès d’eux les démarches entreprises, rapporte Wafa News Agency.

«L'armée israélienne a été contactée parce que c'est elle qui peut aller là-bas et confronter les colons. Elle est responsable, parce que l'armée palestinienne et la police palestinienne ne peuvent pas arriver jusque Taybeh. Le gouvernement israélien a également été contacté. On attend», explique Mgr William Shomali à Radio Vatican. Le vicaire général et vicaire patriarcal pour Jérusalem et la Palestine déplore l’impunité dans laquelle agissent les colons qui se seraient, dit-il, appropriés d’un sixième des 2400 hectares de terrain appartenant aux villageois.

«Il faut créer une opinion publique», explique-t-il, afin de «toucher le gouvernement d'Israël et ceux qui sont responsables». C’est dans cet esprit que le corps consulaire de Jérusalem a été invité à se joindre à ce déplacement, dans l’espoir de créer un réseau d’influence par cercles concentriques. «Ils en parleront avec leurs responsables», espère Mgr Shomali. «Vous savez, c’est comme une pierre qu’on jette dans l’eau, les cercles créés s’élargissent».

Contraints à fuir pour ne pas risquer de mourir

À l’est de Ramallah, la situation des villages palestiniens a empiré. Ce lundi, les chefs des Églises ont renoncé à se rendre dans le village voisin de Kafr Malik, la route étant bloquée par un check-point. Il auraient aimé présenter leurs condoléances aux familles endeuillées par un raid d’une violence inouïe mené le 25 juin dernier par des colons. L'armée est intervenue. Trois jeunes Palestiniens cherchant à se défendre ont été tués. Certains de leurs proches se sont finalement parvenus jusqu’à Taybeh ce lundi. Mgr Shomali fut un de ceux qui les a écoutés, «un moment très émouvant», confie le vicaire pour la Palestine.

Selon un décompte de l'AFP à partir de données de l'Autorité palestinienne, au moins 955 Palestiniens, parmi lesquels de nombreux combattants mais aussi beaucoup de civils, ont été tués depuis le 7 octobre 2023 par des soldats ou des colons israéliens en Cisjordanie.

Et pour éviter le pire, face aux agressions désormais sur large échelle et en plein jour des colons, certains chefs de commaunautés n’ont d’autres choix que de suggérer la fuite collective. Acculés les habitants des villages de Mu’araajat East et de Ras Ein Al Auja ont ainsi quitté leur lieu de vie la semaine passée. 

Un incendie vendredi 11 juillet à Taybeh.