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S?ur Elaine Castro Matheuz et Marie Duhamel - Cité du Vatican

Trois engins piégés ont explosé coup sur coup dans la ville de Cali. En une seule journée, des dizaines de personnes ont été blessées dans des attentats à la voiture piégée ou des fusillades dans les deux départements de sud-ouest colombien.

Anticipant le pire, l'archevêque de Cali avait appelé lundi 9 juin la communauté et les autorités à mettre fin à l'escalade de la violence.

1232 homicides

«Le drame de la violence et de la mort est présent dans notre pays depuis des années», déplore Mgr Luis Fernando Rodríguez Velásquez, et notamment dans sa région où des groupes armés se battent des champs de coca et le trafic de cocaïne. Une situation des plus graves, précise l’archevêque, chiffres à l’appui, dans sa lettre pastorale. «Depuis le mois de janvier 2025, il y a eu plus de 2 437 morts violentes de citoyens colombiens, dont 1 232 homicides et 231 suicides». Il note également une augmentation des féminicides et des attaques contre la communauté LGBT.

Opposer l’amour à la violence

Mgr Rodríguez Velásquez rappelle dans son texte que l'histoire de l'humanité a été marquée par des conflits, depuis le crime de Caïn contre son frère Abel jusqu'aux guerres modernes. Cependant, il souligne que Jésus de Nazareth a proposé une autre voie: «L'accent mis par Jésus dans son travail d'évangélisation était centré sur le commandement de l'amour. Voici mon commandement:’aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés' (Jn 15,12) ». Ce message de paix et de pardon reste essentiel en ces temps difficiles, explique-t-il.

Un levain de communion

L’archevêque de Cali se réfère également aux paroles du Pape Léon XIV qui, dans son homélie au début de son ministère pétrinien, affirmait que «de nos jours, nous voyons encore trop de discordes, trop de blessures causées par la haine, la violence et les préjugés ». Mgr Rodríguez Velásquez invite tous les Colombiens à être «un petit levain d'unité, de communion et de fraternité» et à «accueillir la paix du Christ ressuscité», qui est «une paix désarmée et une paix désarmante, humble et persévérant», selon l’expression formulée par le Pape Léon XIV le soir de son élection au siège de Pierre.

Renforcer l’État de droit

Arrivé dans le diocèse de Cali en 2014, Mgr Rodríguez Velásquez insiste également sur l'importance de retrouver «la valeur de l'éthique, qui nous permet d'avancer sur des chemins de paix et de réconciliation». La lettre exhorte les citoyens à respecter la légalité, à rejeter la justice des justiciers, à valoriser les droits de l'homme et à renforcer l'État de droit, afin de promouvoir une coexistence fondée sur des principes éthiques et la civilisation de l'amour.

Dans les bras de Marie

Face à la douleur, l’archevêque de Cali appelle à accueillir la Vierge Marie comme Mère, car elle console ceux qui souffrent de toutes sortes de peines, comme celles que vivent actuellement la Colombie et le monde entier. «Elle est la femme forte qui a accompagné l'Église naissante dans la prière, l'encourageant à être fidèle à son Fils et à ne jamais perdre espoir », a-t-il déclaré.

L'archevêque termine sa lettre en rappelant que «personne ne doit se sentir exclu de l'amour de Dieu, et que nous devons tous persévérer à surmonter les différences dans le respect et la confiance». Mgr Rodríguez Velásquez invite à marcher ensemble, en construisant une communauté qui regarde l'avenir avec espoir et sans crainte, sur un chemin guidé par les valeurs chrétiennes et l'engagement social.

Pas de revendication

Les attaques de mercredi n’ont pas été revendiquées, mais les autorités privilégient la piste de l’État-major central (EMC), un groupe dissident des Forces armées révolutionnaires de Colombie démobilisées après les Accords de 2016. L’EMC dirigé par Ivan Mordisco a rompu des négociations de paix en 2024. Les autorités locales appellent le gouvernement à intervenir. Le président Gustavo Pedro s'est rendu à Cali ce mercredi, et des milliers de personnes ont assisté à son rassemblement "unis pour la paix".

Rien n’indique que cette vague de violence soit liée à la tentative d’assassinat samedi dernier du sénateur de droite Miguel Uribe, qui brigue la présidentielle fixée à mai 2026. Blessé à la tête et au genou, son état reste critique. Le jeune homme de 15 ans qui l’a visé avec une arme achetée légalement aux États-Unis en 2020, a été formellement inculpé d’homicide ce mercredi.