L'Universit¨¦ catholique d'Erbil c¨¦l¨¨bre son dixi¨¨me anniversaire
Joseph Tulloch ¨C Cité du Vatican
Les chrétiens d'Irak veulent être «non pas une simple statistique», mais «une lumière dans la société». C'est ainsi que le père Karam Shamasha décrit l'inspiration qui a présidé à la création de l'Université catholique d'Erbil.
À l'approche du dixième anniversaire de l'université, le père Shamasha, son doyen, évoque avec Radio Vatican-Vatican News son objectif initial d'éduquer les minorités religieuses d'Irak, son nouveau département d'études orientales et de religion comparée, et ses projets pour la deuxième décennie. Entretien.
Comment l'université catholique d'Erbil a-t-elle vu le jour?
L'université a vu le jour en 2014, alors que les chrétiens irakiens étaient déplacés de leurs villages par l¡¯État islamique. En 2015, Mgr Warda, l'archevêque d'Erbil, a vu que l'Église aidait les gens en les nourrissant, en les protégeant, en leur donnant des lieux d'hébergement, et a décidé que nous devions aussi les fournir un service d¡¯éducation.
Il a donc créé l'université catholique d'Erbil. Nous avons commencé à contacter des personnes du monde entier pour nous aider à faire de ce rêve une réalité. Au début, nous avons reçu l'aide de la conférence épiscopale italienne et d'autres organisations. Les premiers étudiants étaient issus de groupes minoritaires, comme les Yazidis, les chrétiens, etc. Ils avaient été déplacés par le groupe État islamique, forcés de quitter leurs maisons.
Aujourd'hui, nous avons environ 725 étudiants. La plupart d'entre eux sont chrétiens, environ 60%, environ 30% sont musulmans, et les 10% restants sont des Yazidis ou issus d'autres minorités. Nous avons donc toutes les couleurs de l'Irak, toutes les ethnies.
Nous espérons être une lumière, un lieu où les gens peuvent apprendre la vertu. Nous ne voulons pas nous contenter d'offrir une éducation normale. La majorité des Irakiens sont musulmans, et les chrétiens sont très peu nombreux: ils ne sont plus que 200 000, et leur nombre ne cesse de diminuer. Mais nous voulons vraiment être une lumière dans la société, non seulement en fournissant une éducation, mais aussi en construisant la paix et en établissant des relations entre les différents groupes.
Quelles réactions votre mission a-t-elle suscitée?
Au début, les gens trouvaient un peu étrange que nous essayions de construire quelque chose de catholique dans une région à majorité musulmane. Mais notre point de vue est le suivant: c'est notre terre, nous voulons être ici, pas seulement comme une statistique, mais comme une lumière dans la société. Il serait terrible, pour tous les chrétiens, qu'à l'avenir il n'y ait plus de chrétiens en Irak. Le fait que nous ayons maintenant une université, une université catholique -ce n'est pas rien pour nous.
C'est la seule université du Moyen-Orient qui porte ce nom. Il existe de nombreuses universités catholiques au Liban, en Palestine, etc., mais aucune d'entre elles ne porte le titre d'«Université catholique».
En septembre, l'université fêtera son dixième anniversaire. Que ressentez-vous à cette occasion et quelle est votre vision pour les dix prochaines années?
Nous sommes très enthousiastes à l'idée de fêter cet anniversaire et très reconnaissants envers toutes les personnes qui nous ont aidés à en arriver là. Pour les dix prochaines années, nous voulons nous intégrer davantage dans le monde de l'enseignement supérieur catholique international. Il y a quelques mois, nous avons pu adhérer à l'Association des collèges et universités catholiques, et je travaille actuellement à l'établissement de liens avec la Fédération internationale des universités catholiques.
Comme je l'ai dit, nous ne voulons pas nous contenter d'offrir une éducation normale. Nous voulons offrir une éducation de très haute qualité basée sur la tradition intellectuelle catholique. Dans notre déclaration de mission, nous le disons très clairement. Nous souhaitons également dispenser un enseignement de qualité en études orientales, sur la Mésopotamie et les origines du christianisme et des autres religions.
Nous avons déjà ouvert un département d'études orientales et de religions comparées, et c'est un domaine sur lequel nous nous concentrons vraiment -enseigner à nos étudiants les origines de leurs propres religions et des autres religions, et contribuer ainsi à la construction de la paix.
Vous dites que 40% de vos étudiants ne sont pas chrétiens. Cette approche comparative doit donc être très appréciée par les étudiants d'autres religions?
Oui, sans aucun doute. En fait, lorsque de nombreuses personnes en Irak apprennent que l'Église est derrière l'Université, elles ont confiance et sont sûres que leurs enfants y seront en sécurité et qu'ils y recevront le meilleur type d'éducation.
C'est aussi la mission de l'Église, qui est mater et magistra, mère et enseignante. Assurer l'éducation fait partie de notre mission, et nous nous efforçons d'être un centre d'éducation pour les étudiants de toutes les confessions. Le nouveau département d'études orientales et de religions comparées, dédié à la construction de la paix, en fait partie. Nous voulons vraiment être un lieu où l'on diffuse la lumière des bonnes relations entre les communautés et où l'on construit ensemble le bien commun.
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