L’adieu des Parisiens au cardinal Vingt-Trois
Xavier Sartre – Cité du Vatican
Ni fleurs, ni couronnes, ni éloge funèbre. Seule une croix en fleurs déposée devant le cercueil, sous les voûtes de Notre-Dame de Paris. Le cardinal André Vingt-Trois, qui célébra l’eucharistie de nombreuses fois pendant plus de douze ans à cet autel, a reçu ce mercredi matin l’hommage des Parisiens lors de la messe célébrée par Mgr Laurent Ulrich, actuel archevêque de Paris. Entouré de dizaines de prêtres du diocèse de Paris, d’évêques et archevêques français, et de cardinaux, dont Mgr Jean-Marc Aveline, président de la Conférence des évêques de France (CEF) qui déposa le pallium sur le cercueil au début de la cérémonie, et qui concélébra avec le cardinal François-Xavier Bustillo, évêque d’Ajaccio.
Les actes bien plus forts que les paroles
«La vie du cardinal a été traversée par la rencontre du Seigneur Jésus» a déclaré Mgr Ulrich dans son homélie, précisant que «le Seigneur a bien tracé un sillon dans sa vie, nous en avons vu la trace». Sans en dresser l’éloge, ce qu’a refusé le défunt dans ses dernières volontés, l’archevêque de Paris a rappelé la conviction profonde de cet homme à la «timidité bourrue» que l’annonce de la Parole de Dieu ne sert à rien «si les discours ne cèdent pas la place aux actes». C’est pourquoi «il attendait des chrétiens une manière de vivre différente et des gestes qui orientent les autres vers cette même rencontre avec le Seigneur».
Certes, étant à la tête d’un des principaux diocèses de France et président de la CEF, il prit de nombreuses fois la parole dans les médias pour présenter les positions de l’Église dans de nombreux dossiers, «comme les questions familiales, mais aussi sur le respect dû à toute personne fût-elle sans abri, ou étrangère et migrante sur notre sol, et encore sur le sens profond de la laïcité dans notre société publique». Mais au-delà des mots, «ce qui change quelque chose, c’est la manière de vivre», disait le cardinal Vingt-Trois.
Liturgie, dialogue entre l’Église et monde, charité
De cette vie, Mgr Ulrich a retenu trois «directions» vers lesquelles le cardinal Vingt-Trois a agi, la liturgie, le dialogue entre l’Église et monde et la charité. La liturgie, «lieu où le peuple chrétien expérimente la rencontre avec Dieu», a précisé l’archevêque de Paris, est la manifestation de l’amour que Dieu porte à son peuple. C’était la joie du cardinal Vingt-Trois dont «l’horizon de la conversion intérieure», «c’était bien l’amour de Dieu pour toute l’humanité». Toute sa vie, il a voulu «se faire porteur de cet amour et de la joyeuse annonce du salut proposé à tous». Dans cette optique, «le prêtre était bien l’homme des sacrements […] pour irriguer ces vies d’hommes et de femmes qui seraient changées par la rencontre du Christ» a affirmé Mgr Ulrich.
Au cours de son sacerdoce et de son épiscopat, celui qui fut également archevêque de Tours avant de revenir dans la capitale française, déclara que «notre joie et notre bonheur (de prêtre ndlr) […] c’est de faire ce que Dieu attend de nous, là où nous sommes, dans l’état où nous sommes». Des mots, pour Mgr Ulrich, «qui dévoilent avec acuité l’humilité et la simplicité du cardinal Vingt-Trois» et qui traduisent «son souci du service que les chrétiens peuvent et doivent, au nom de leur baptême, rendre au monde, à leurs frères et s?urs». Pour l’ancien archevêque de Paris, le rôle de l’Église au XXIe siècle relève du «témoignage de vie des chrétiens, témoignage de la présence de Dieu qui peut bouleverser une existence, une société, l’emporter vers le bien, et sans lequel toute parole tourne comme à vide».
En matière de dialogue, il a fait sien «le magnifique projet de dialogue qu’est le Collège des Bernardins», reprenant le flambeau de son prédécesseur, le cardinal Lustiger et manifestant «avec force comment la relation avec le monde est au c?ur de la mission de l’Église». Enfin, le cardinal Vingt-Trois s’impliqua grandement en faveur de la charité. Mgr Ulrich a rappelé Hiver Solidaire, une initiative en faveur des sans-abris créée par le défunt cardinal et qui fit florès dans toute la France. «Il voulait inviter les catholiques de Paris à opérer une véritable et profonde conversion des c?urs, par le don de l’attention et de la présence à l’autre, plus difficiles et plus précieux encore à donner que le temps ou l’argent».
Le cercueil du cardinal Vingt-Trois a rejoint à l’issue de la célébration le caveau des archevêques situé sous le ch?ur de la cathédrale où il a été inhumé.
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